Dormant paisiblement sur un sol froid... oh ! Le sol est froid, elle en frissonna en fait et ouvrit par la même occasion d'un coup ses yeux bleutés pour voir l'endroit où elle se trouvait, écarquillant les yeux face à la lumière que dégageait cet endroit par la faute de l'extérieur et des fenêtres. Elle était complètement allongée par terre, comme une clocharde dirait son père, mais elle se releva à la hâte, manquant de s'écraser au sol à cause du vertige qui la submergea à ce moment-là. Elle voyait un peu flou et ne comprenait pas ce qui se passait dans ce lieu intrigant.

Elle ne se souvenait de plus rien.

Mais si, voyons, l'accident de voiture avec Louis, sa voix qui hurlait en avance en voyant l'autre caisse leur foncer dessus et ensuite ses yeux qui se refermaient lourdement en entendant un jeune homme paniqué répéter son nom à plusieurs reprises. Il l'avait vue mourir sans être en mesure de pouvoir faire un truc, probablement, mais c'était trop tard dorénavant, elle était morte. Plus personne pour la ranimer à l'hôpital le premier janvier deux mille seize. Sa date d'anniversaire, comme par hasard. Elle avait enchaîné malheur sur malheur ou quoi . Malédiction ! Ses parents étaient des chrétiens, ils vont croire qu'elle a osé faire quelque chose de mal durant sa vie pour mériter la mort.

« Où suis-je ? se demanda-t-elle en plissant les yeux. »

Lorsqu'elle fit un pas en avant, un bruit retentit. Elle pencha la tête vers le bas pour regarder le sol gelé et constata qu'une cuillère en métal légèrement rouillé l'attendait avec impatience, c'était pour sa poire, bien sûr, de collecter les vieux bidules dont elle n'avait absolument pas besoin, quoique, ça pût lui être utile dans l'avenir. Oh ! Pouvons-nous parler d'avenir alors que nous sommes décédé ? C'est effrayant à dire... « dans l'avenir ». Elle ramassa la cuillère.

Elle vit une personne dans la pièce. Elle n'était pas toute seule, alors. Combien de temps avait-elle dormi en ce lieu mystérieux ? Une bonne heure ? Quelques dizaines d'heures peut-être ? Justes quinze minutes ? Et puis zut, ça n'avait que peu d'importance, le point essentiel était qu'elle était finalement vivante et qu'aucun membre de sa famille pourra s'en réjouir depuis la Terre. Oui, parce qu'elle ne savait pas si c'était sa planète où elle se trouvait, sûrement le ciel, le paradis comme ils disaient les croyants. Faites juste que ça ne soit pas l'Enfer, Satan lui fait si peur.

Gaïa se rendit vite fait vers l'inconnu endormi pour le secouer délicatement, on ne réveille pas une personne brutalement, ça ne se fait pas racontait sa grand-mère. En Angleterre, elle avait été très bien élevée et ne manquait pas d'éducation, elle en était persuadée. Son ventre criait famine, elle le remarqua quelques secondes après avoir touché le beau à la maison en ruine. L'ironie.

« Réveillez-vous monsieur ! Nous ne sommes pas dans une chambre, mais dans une pièce complètement gelée, vous n'avez pas froid ? elle lui parlait alors qu'il n'écoutait pas. »

Elle soupira.

« Debout ! Debout ! hurla-t-elle fortement et joyeusement. Si vous ne vous levez pas, le méchant lutin du dodo va venir vous gronder ! Bah... ça existe, les lutins du dodo au moins ? »

Gaïa ricana toute seule à l'idée qu'un petit lutin du dodo puisse venir faire une pichenette sur le front du beau jeune homme à l'ouest.

Lorsque le jeune homme ouvrit ses yeux un par un, elle se pencha pour le regarder, sauf qu'il prit très mal le fait qu'elle le secoue. Etait-ce brutal à son goût ? Pourtant, elle y avait été délicatement, alors là, elle ne comprenait pas du tout pourquoi il réagissait de cette façon alors qu'elle ne faisait qu'être aimable depuis le début. Les inconnus sont tellement incompréhensibles !

Il s'excusa de s'être comporté de cette manière après avoir dit qu'il risquait de faire une crise cardiaque, une remarque qui pinça la demoiselle pour la faire éclater de nouveau de rire. Décidément, il était marrant celui-là, il pensait vraiment que faire une crise cardiaque dans son nouveau cocon lui serait bénéfique ? Elle continuait de pouffer de rire.

« Une crise cardiaque, hein ?! répéta-t-elle entre deux rires. Vous êtes déjà mort, monsieur ! »

Sauf qu'elle se rendit compte de ses propos qu'une fois dit à voix haute. Son rire ne se fit plus entendre et son sourire s'échappa de ses lèvres pour laisser un air désolé sur sa bouille d'ange au regard triste dorénavant. Quelle nouille, celle-là ! Dire à quelqu'un qu'il était mort, ça n'était jamais agréable, mais d'un côté, on avait jamais besoin de le dire puisque la personne décédée ne parlait plus en temps normal, évidemment.

Alors elle s'excusa rapidement pour ses paroles blessantes, peut-être. Elle n'aimait pas être méchante, oui, pour elle c'était peu sympathique ce qu'elle venait de dire et ça n'était pas faux dans un sens. On ne balançait pas ce genre de choses à quelqu'un qui s'excuse après d'avoir était désagréable au réveil.

« Je le méritais, réveiller quelqu'un n'est pas cool. En tous cas, je tiens à me faire pardonner pour les propos que je viens de tenir, entendre de la part d'une inconnue qu'on est mort n'est pas sympa, toutes mes excuses. »

Elle fit une pause et soupira un peu avant de reprendre.

« Vous êtes mort de quoi, au juste ? »

Il lui demanda de cesser de le vouvoyer, elle accepta évidemment, ça l'arrangeait d'un côté puisqu'elle était persuadée qu'il devait avoir dans la même tranche d'âge qu'elle. La suite déplût à la jeune femme qui se sentit vexée en apprenant qu'il la considérait comme une enfant alors qu'elle avait eu vingt ans le premier janvier, le jour de sa date de décès aussi. Quel prétentieux, celui-là, se croire plus grand qu'elle, alors que c'est complètement faux. Mais, d'un côté, elle ne pouvait pas lui en vouloir, quoique il aurait pu s'aider de ses habits qui ne faisaient pas gamine, par moments elle faisait de sacrée tête en boudant par exemple, elle avait aussi une bouille d'enfant, voilà tout.

« J'ai vingt ans, je suis aussi une adulte, lui avoua-t-elle. »

Finalement, il lui dit qu'il était décédé suite à une overdose. Médicaments de trop ? Drogue et alcool en plus se rajoutant au mélange dégueulasse que ça formait déjà à eux deux ? Elle n'en savait trop rien, c'était une sainte, une petite pucelle qui ne connaissait absolument pas la vie que devrait mener une jeune femme de son âge, ou même d'un jeune homme possédant la vingtaine. Ses parents la préservaient du mal comme ils le disaient sans cesse, c'était sympathique de leur part, mais ça l'ennuyait des fois, elle aurait voulu connaître les plaisirs d'une adolescente et les joies d'une adulte avant de crever telle une idiote dans une voiture d'un garçon avec qui elle venait de reprendre contacte. En fait, elle aurait même dû appeler son père pour qu'il vienne la chercher et l'emmener jusqu'à chez lui pour fêter l'anniversaire de son unique fille.

« Je suis morte dans un accident de voiture. Le choc fut terrible ! »

Gaïa n'avait pas touché une seule fois à une dose d'alcool et de drogue, par contre, elle avait déjà pris des médicaments sauf pour se « droguer », c'était uniquement pour but de se soigner contre les maux de têtes qu'elle avait après une dure journée à l'université, alors forcément, le fait qu'elle soit fasse à un monsieur qui a fait une overdose l'intrigue et pique sa curiosité.

« C'est bien, la drogue ? Et l'alcool, c'est bon ? Puis ça fait quoi de mourir d'une overdose ? Pas trop eu mal ? T'es mort les yeux ouverts ou fermés ? »

Oui, ses questions étaient aussi ridicules qu'elle.

Le jeune homme avait tenté d’assouvir la curiosité de la demoiselle en répondant à sa question difficilement. Elle n'était pas totalement consciente du fait qu'elle venait de poser une question quasiment compliquée, on pouvait y répondre, c'était évident, mais les réponses sont différentes suivant la personne à qui on le demande.

Elle s'étira un bref instant parce que cette longue sieste lui paraissait fatigante, finalement. La jeune femme continua d'esquisser un sourire, elle oublierait rapidement qu'elle s'est fait insultée d'enfant par lui, encore heureux pour la peau de l'inconnu, d'ailleurs. Elle ne connaissait pas encore son prénom. Le nom, elle s'en fichait très certainement, peut-être qu'elle ne l'a jamais connu et qu'il est mort quelques années après elle ou avant, même, de toute façon, elle ne sait pas combien de temps elle est restée sur ce sol, à dormir comme une paresseuse sortie d'un film ennuyant où on a qu'une envie : s'écraser contre son canapé et fermer les yeux en écoutant distraitement le DVD.

Ce fut à son tour de poser quelques questions la concernant. Des choses ayant un rapport avec celles de Gaïa, bien sûr. T'as déjà fumé ? T'as déjà posé tes lèvres sur le verre comportant du vin ou de la vodka ? Puis pourquoi tu poses ces questions ? Des petits bidules qu'on ne poserait pas en temps normal, ou quoique si. Il suffit de se retrouver face à une femme comme Gaïa pour se retrouver à dire tout ça. Enfin, bon, normalement, on ne les pose pas, à moins d'être coincé quelque part avec une fille qui nous saute dessus pour connaître les raisons de notre décès.

« J'aurais probablement bu du vin le jour de ma mort si je n'étais pas montée dans cette voiture pour fêter mon vingtième anniversaires. Par contre, pas question que je touche à la cigarette, moi, je tiens à mes poumons ! »

Elle s'arrêta de parler pour réfléchir à ce qu'elle dirait. De la drogue, non, elle n'en avait jamais prise et elle ne savait pas si ça n'avait pas été une erreur de ne pas essayer. Ses parents l'auraient tués s'ils savaient ce qu'elle pensait en ce moment même. Toucher à de la drogue, pas question, ta mère t'as donner le nom de la déesse de la Terre, si tu te drogues, tu déshonneur la raison pour laquelle tu as ce prénom.

« C'est pas mon truc, la drogue. Et je pose des questions parce que je suis curieuse. Pourquoi, toi, t'as pas envie de savoir ce que j'ai enduré avant de fermer définitivement les yeux ? Au moins, t'as pas souffert. »

En un sens, Gaïa lui reproché de ne pas avoir souffert comme elle durant son accident, dans la voiture de Louis. Au passage, elle espérait ne pas rencontrer un Louis ! Elle maudirait cette personne, très probablement. Excepté ça, elle se rendit une nouvelle fois compte que sa gaieté n'était pas à son avantage et qu'elle commençait à passer ses nerfs sur un inconnu qui ne le méritait pas.

On a tous envie de péter un câble lorsque quelque chose nous arrive sans qu'on le veuille. C'était le cas de la jeune femme qui commençait à accumuler trop de tracas en elle. Elle regarda par terre sans relever la tête, soufflant un instant pour faire partir les ondes négatives de son corps et de ses pensées les plus sombres en cet instant si douloureux puisqu'elle se remémorait son décès.

« Excuse-moi, ce n'est pas dans mon habitude d'être comme ça. J'ai l'impression que, depuis le début, nous passons notre temps à nous excuser, se marra-t-elle. »

« En temps normal, c'est pas dans mes habitudes de m'excuser à longueur de journée, mais j'aime bien ta p'tite bouille d'ange. »

Gaïa prit une teinte rouge à cause, ou grâce qui sait, du compliment qu'il venait de lui faire. C'était vraiment quelqu'un de sympathique, depuis le début, bien qu'il avait un air genre « c'est moi le meilleur », il restait courtois à sa façon et n'attrapait pas la jeune femme par les cheveux pour la cogner contre un mur par rapport à ses nombreux dérapages, à elle.

Elle n'avait pas fait attention, mais en espace de quelques minutes, elle était passée par la joie, la tristesse et la jalousie d'une manière ou d'une autre. Oui, elle enviait le garçon de ne pas avoir souffert durant sa mort, elle aurait voulu qu'il connaisse la même chose, sauf que là, ça paraît très égoïste de sa part et elle n'est pas égoïste, elle est généreuse en temps normal, très gourmande et exceptionnellement joyeuse.

« Damon ? En anglais, ça signifie démon, ça te va à merveille ! se moqua-t-elle gentiment en lui ébouriffant les cheveux. Gaïa Miller. Tu trouves vraiment que je suis un ange avec une petite bouille... d'ange ? »

Ça l'avait étonné sur le coup, savoir qu'il trouvait qu'elle avait une tête de petit ange, mais ça n'était pas déplaisant de passer pour un ange, une sainte surtout. Lui, au moins, il ne se moquerait pas d'elle comme pourrait le faire un britannique qu'elle croiserait dans la rue et qui aurait fait partie de son école primaire, par exemple. Bon, les exemples vont loin puisqu'elle est morte et qu'elle ne risque pas de revoir un de ses anciens camarades, que ce soit à l'école primaire ou à l'université, dans sa classe de psychologie.

« Merci, le remercia-t-elle pour la flatterie. T'es cool, je t'aime beaucoup, tu sais ? »

Elle attendait de voir sa réaction. Oui, elle l'adorait déjà alors que ça ne faisait pas encore trois jours qu'ils se connaissaient, mais ce n'était pas de sa faute, Gaïa s'attachait aux gens facilement et rapidement. Surtout qu'il avait attisé sa curiosité, alors forcément, elle l'appréciait.

Il ria sûrement à cause de la teinte qu'avait pris le visage de la jeune femme, c'était possible. Ou bien, il est paranoïaque et voit des squelettes dansaient autour d'eux. Ce serait vachement étrange. Très étrange. Et seulement là, Gaïa pourrait courir très loin d'ici, loin de lui surtout.

« Je vais sérieusement croire que je te fais de l'effet, Miss. »

Elle leva les yeux à ce moment là en pouffant de rire au passage. Il était marrant et exaspérant à la fois. C'était un compliment, elle n'était pas spécialement courageuse, alors oui, elle rougissait à chaque fois qu'on lui faisait une petite flatterie gratuitement, sans même qu'elle le demande. Malgré ce jeune homme vantard, elle gardait son sourire et sa bonne humeur au lieu de devenir dépressive, parce qu'il était là et qu'elle pouvait enfin compter sur quelqu'un, elle ne savait pas si une autre personne l'avait vu dormir, mais le destin a voulu qu'ils se réveillent ensembles, dans cette vieille bâtisse qui possédait des plats appétissants. Si, si, Gaïa a eut le temps de remarquer les repas sur une table, non loin d'eux, mais comme on dit si bien « les apparences sont parfois trompeuses » et il n'était pas question qu'elle accepte de manger quoi que ce soit si elle ne savait pas d'où ça provenait.

Lorsqu'elle lui avait dit qu'il était « cool » et qu'elle l'aimait beaucoup, il lui répondit avec son fidèle petit sourire de crâneur (parce que ça faisait penser à la jeune femme à un sourire de vantard et de crâneur professionnel) ;

« Maintenant, je le sais.
– Ooh ! Personne ne te l'as jamais dit ? elle pouffa de rire, mais en reprenant son sourire et son calme, elle lui dit : et moi, tu me trouves comment ? Cool ? »

Juste pour savoir ce qu'il pensait d'elle. Pour une première impression, elle avait tapé fort en lui ôtant la chance de dormir encore, elle aurait très bien pu s'en aller sans jamais lui adresser la parole et lui, il aurait été tranquillement en train de somnoler. Ouais, il se serait amusé comme un petit fou dans cet endroit, il aurait réussi à trouver une sortie et personne ne l'aurait dérangé.